Une mĂ©thode Assimil dĂ©diĂ©e au latin, gonflĂ©e l’entreprise leader des mĂ©thodes de langues vivantesâŻ! RĂ©cidiviste, elle propose en plus des mĂ©thodes pour les hiĂ©roglyphes et le sanscrit.
Assimil a pris ici (et depuis longtemps) un parti osĂ© en l’ajoutant Ă sa collection cĂ©lĂšbre des mĂ©thodes « sans peine » de langues vivantes. Le rĂ©sultat est-il Ă la hauteurâŻ? Le dĂ©fi rĂ©ussiâŻ? Mais, d’abord, une question existentielle se pose…
Pourquoi apprendre le latin�

Le latin, langue morte�
En dehors du Vatican, d’Ă©glises, d’Ă©coles de latin comme celle-ci, ce sĂ©jour Ă Rome, ces week-ends d’immersion ou encore des clubs de latinistes, le parler latin se fait rare d’oĂč le nom pas vraiment glamour de « langue morte », classique ou ancienne Ă©tant beaucoup plus sympa…
Si l’ougaritique et son Ă©criture cunĂ©iforme semble vraiment dĂ©funte, le latin est en fait bien vivant et rĂ©pandu sur toute la planĂšte par le biais des langues romanes (espagnol, français, catalan, portugais…) ou mĂȘme de langues germaniques (anglais, allemand). On retrouve ainsi le systĂšme de grammaire (comme les dĂ©clinaisons) dans le russe ou l’allemand (verbe en fin de phrase). Ce sont les racines linguistiques les plus diffusĂ©es dans le monde. Par exemple, les deux langues les plus utilisĂ©es dans une recherche de nom de marque globale sont l’anglais et le latin en raison d’une certaine universalitĂ© (une activitĂ© professionnelle de l’auteur bien placĂ© pour le savoir…) Les caractĂšres « latins » ou « romains » se retrouvent partout. Le latin, un truc omniprĂ©sent pas rĂ©ellement enfoui…
PlutĂŽt que de rĂ©inventer le char et l’aqueduc, voici quelques liens pour comprendre et Ă©ventuellement vous convaincre de l’Ă©tudier :
Les langues anciennes :
Le latin :
- Top reasons to learn latin (half of English words are off Latin roots…)
- Débat sur Quora English
- Au collĂšge
- Pourquoi-apprendre-le-latin
- Le latin, une langue qui en jette (mĂȘme Topico s’en mĂȘle)
- Latinitatis.com
- Choisir le latin pour la sixiĂšme
Latin versus italien
Une relation tendre-amĂšre du latin versus italien joliment racontĂ©e et documentĂ©e (et avec sincĂ©ritĂ©) sur le blog « Mordus d’Italie ».
La méthode Assimil latin langue vivante
Le lab des langues, dĂ©diĂ© aux langues Ă©trangĂšres vivantes, a Ă©tĂ© intriguĂ© par cette Ă©trange initiative d’Assimil d’oĂč le test…

Ă la rĂ©ception du coffret Assimil « le latin », on est tout de suite attirĂ© par l’aspect moderne de son contenu. Comme pour les trĂšs nombreuses mĂ©thodes qui ont fait son succĂšs, nous avons un manuel rassemblant une centaine de conversations/leçons, des CD audio Ă l’identique des langues vivantes. Troublant.
Les points communs avec la collection « sans Peine »
On retrouve donc le dĂ©coupage en 101 leçons proposĂ©es avec un petit mode dâemploi (Ă lire), lâalphabet et la prononciation en introduction. De courtes (30 minutes de travail environ) puis progressivement plus complĂštes et accompagnĂ©es dâĂ©lĂ©ments de grammaire progressifs, elles rĂ©utilisent le vocabulaire dĂ©jĂ rencontrĂ© pour une meilleure mĂ©morisation (rĂ©pĂ©tition espacĂ©e) et ont toujours une structure identique avec :
- Une conversation ou dialogue et sa traduction sur la page opposée
- Des notes sur des difficultés ou points nouveaux
- Des remarques de prononciation
- Un exercice de traduction dâun texte reprenant les termes du dialogue et son corrigĂ©
- Souvent un petit commentaire interculturel
- Un prĂ©cis de grammaire et le glossaire complet en fin dâouvrage du vocabulaire employĂ© Ă double entrĂ©e (français et latin)
- Les petits dessins Ă l’ancienne d’humour
Rappelons avec Wikipedia le principe de cette collection.
Le choix a Ă©tĂ© de reprendre Ă l’identique la structure des mĂ©thodes de langues vivantes avec une adaptation (un char Ă la place d’une voiture, par exemple) mais en gardant des situations de vie et des dialogues courants (venez dĂźner ou je vais Ă la pĂȘche). Les dialogues sont enregistrĂ©s et permettent de « parler » enfin le latin. Cette approche est trĂšs fun et judicieuse plaçant ainsi le latin dans un contexte vivant contrairement aux Ă©tudes classiques. C’est le point fort de la mĂ©thode.
Le concept de langue vivante pour le latin a Ă©tĂ© crĂ©e par un certain Desessard et rééditĂ© (aprĂšs une interruption) par Assimil : celle-ci Ă©tait rĂ©guliĂšrement rĂ©clamĂ©e. Câest pourquoi nous avons dĂ©cidĂ© de rééditer cet ouvrage en le mettant Ă jour sans dĂ©naturer lâĆuvre. Nous avons fait appel Ă Chantal Guglielmi, professeur de lettres classiques,.
L’aperçu d’une leçon

Notons que le latin, langue racine du français est quand mĂȘme trĂšs diffĂ©rent. Le français est d’ailleurs la langue romane qui s’est la plus Ă©loignĂ©e du latin. Donc « sans peine » mais pas sans travail, la langue latine…
L’audio, le latin Ă l’oral
Une question Ă©vidente se pose : quelle est l’authenticitĂ© du parler utilisĂ©âŻ? Des recherches ont rĂ©introduit des prononciations d’avant une latinisation monocorde Ă la française. Lire cette Ă©tude pour comprendre le retour de la prononciation reconstituĂ©e.
La mĂ©thode utilisĂ©e dans l’ouvrage est dĂ©crite ici par Assimil avec un enregistrement Ă plusieurs voix. La version italienne, plus chantante et lĂ©gitime, a de loin ma prĂ©fĂ©rence. Dommage qu’elle n’est pas Ă©tĂ© conservĂ©e pour l’ensemble des enregistrements, l’auteure souhaitant proposer une diversitĂ© historique. Notons que les rĂšgles de prononciation avec ses tons transforment l’usage du latin soporifique et sans saveur de la vieille Ă©cole…
Le choix d’un mĂ©lange dans un mĂȘme texte n’est par contre pas trĂšs heureux et trouble la concentration (du moins la mienne). Les conversations au minimum avec un seul accent par leçon auraient Ă©tĂ© plus agrĂ©ables.
Les particularismes de la version latine versus « langues vivantes »
Les notes de vocabulaire sont trĂšs consistantes et ajoutent de la grammaire. Les notes en rouge, plus culturelles sont aussi trĂšs intĂ©ressantes et l’ensemble apporte une lecture passionnante en plus de l’apprentissage. Le lien avec les langues romanes est souvent rappelĂ© et donne Ă l’ouvrage une dimension diffĂ©rente (culturelle et europĂ©enne). Toutefois leur poids et prĂ©cision alourdissent un peu l’apprentissage…
La grammaire progressive a mis le turbo en comparaison avec celles des langues vivantes et est beaucoup plus consistante (pavĂ©, c’est le mot, de bonnes intentions, certes) surtout si on y ajoute les notes et les ajouts intraconversation. On a mĂȘme dans les premiers textes (conversationâŻ!) des conjugaisons qui se baladent. Ăa fait un peu tache dans cette collection… On comprend la latiniste qui souhaite offrir un ouvrage complet, mais dĂ©roge quelque peu Ă la rĂšgle Assimil. En mĂȘme temps il s’agit a priori d’une langue proche plus facile d’accĂšs…
On n’a pas voulu, par exemple comme en russe, sĂ©parer autant l’Ă©tude de conjugaisons et de cas et on a rapidement des tableaux complets Ă avaler. La mĂ©thode est toute sauf passiveâŻ!
L’ouvrage est dense, en particulier Ă cause des notes et semble correspondre au choix de proposer un livre suffisamment complet pour plaire Ă des latinistes. L’ajout de nouveaux mots semble aussi beaucoup plus rapide (trop) que dans les autres mĂ©thodes. L’effet rĂ©pĂ©tition espacĂ©e avec trop de nouveautĂ©s peut en souffrir. Le texte est aussi plus riche, dense et variĂ©…
Les querelles d’experts sont nombreuses (sur la prononciation encore plus:-) et ils peuvent oublier un peu les apprenants dĂ©butants dans leurs discours et choix. Cette sensibilitĂ© de latinistes se ressent d’ailleurs dans les choix d’Ă©criture de l’ouvrage (Ă mon avis un peu au dĂ©triment du plaisir d’apprendre et de la simplicitĂ©). Mais trop toucher aux habitudes du latin en France relĂšve de l’outrage comme pour la langue française…
Autres produits « latin »
Ăthymolinguo, le jeu des racines grecques et romaines et le dictionnaire de latin


Nous aimons
- Parler latin, c’est quand mĂȘme autre chose que le thĂšme latin de son enfance…
- Un livre Ă lire en plus d’une mĂ©thode
- L’univers « langues romanes »
- La mĂ©thode a le mĂ©rite d’exister sous une forme vivante et moderne
- TrÚs complet (trop�)
- Un ouvrage devenu référence

Nous aimons moins
- La variĂ©tĂ© de voix dans une mĂȘme conversation peut ĂȘtre dĂ©plaisante. On s’endort un peu et on se rĂ©veille avec les voix italiennes ou espagnoles. Mais les autres avec l’accent de LutĂšce…
- Un peu pavĂ© en comparaison des autres mĂ©thodes. On ressent le poids des latinistes…
- Progression un peu trop rapide de la grammaire et de la richesse du vocabulaire pouvant impacter la moyenne recommandĂ©e d’Ă©tude de 30 minutes.

Notes du Lab

L’expĂ©rience est globalement rĂ©ussie. l’application de la mĂ©thode sans peine au latin donne un aspect vivant et utile (on peut enfin parler en latin!). L’image de marque de l’enseignement de cette langue et le label langue morte n’a pas beaucoup aidĂ© les latinistes en herbe et les vocations. Avec le latin par Assimil, on peut enfin aborder avec plaisir cette Ă©tude (c’est son grand mĂ©rite) et ainsi plonger dans ses racines au coeur des langues romanes. Il est vrai que le latin comme le grec permet de mieux comprendre et manier la langue française mais cet argument doit ĂȘtre en partie abandonnĂ© pour voir plus en grand et dans une dimension culturelle europĂ©enne (item de communication entre des Ă©lĂšves Ă©trangers). Une motivation sympathique est aussi, par exemple le voyage vers une Italie ou une Espagne et pouvoir y lire des inscriptions romaines Ă l’Ă©lu(e) de votre coeur.
La mĂ©thode est lĂ©gĂšrement diffĂ©rente de celles des langues vivantes par le poids de ses notes, la grammaire et son vocabulaire enrichi qui fait plus penser Ă une mĂ©thode « perfectionnement » dans son usage. L’avance dans la mĂ©thode est donc un peu plus lente mĂȘme si la parentĂ© peut faciliter la comprĂ©hension. Un gros regret: l’usage unique de la voix italienne aurait donnĂ© beaucoup plus de vie Ă ce latin.
Le choix commercial entre un ouvrage de dĂ©couverte et un manuel pour satisfaire des latinistes n’Ă©tait pas Ă©vident… Il est comprĂ©hensif que l’on ait voulu faire un seul volume de ce qui aurait dĂ» ĂȘtre un volume de dĂ©marrage et un volume de perfectionnement comme dans le cas des langues vivantes. Disons que l’on a tout en un et un pour tous!
Annexes
Le lien incontournable!
Autres liens:
- Apprendre le latin avec des Legos avec Legonium, un truc de ouf
- Le latin expliqué aux enfants
- Ressources pour le latin
- Lelatinsanspeine.fr

En finir avec le pensum: le latin et moi, ça fait deux…
L’auteur de l’article a connu au lycĂ©e le Gaffiot, les thĂšmes et les cohortes romaines de la guerre des gaules dĂšs la sixiĂšme (Ă l’Ă©poque lycĂ©e) ce qui a eu le mĂ©rite de booster son intĂ©rĂȘt pour les langues vivantes et d’instituer un rejet dĂ©finitif et sans appel du concept de « thĂšme latin »… Des annĂ©es plus tard et une dizaine de mĂ©thodes Assimil langues vivantes dans sa besace, sa curiositĂ© s’est Ă©veillĂ©e avec l’offre de la mĂ©thode Assimil pour une langue a priori « morte ».
Son opinion sur le latin pour apprendre les langues romanes se rĂ©sume Ă cette citation d’un polyglotte:
As for the claim that it helps with learning Romance languages, knowledge of any one Romance language helps with learning the others. You donât need to learn the parent language.
ou Ă ce texte en italien.. Textes non traduits car, passant quelquefois devant la Sorbonne, je ne tiens pas Ă recevoir une volĂ©e de cailloux ou un pilum đ
Toutefois…
Ayant Ă©tudiĂ© le latin, français, italien et espagnol et Ă©tant amateur d’histoire et de voyages et en ajoutant un beau certificat d’enseignant de l’intercomprĂ©hension des langues romanes aux enfants, il lui est venu Ă l’idĂ©e que dans un monde moderne et une Ă©cole surchargĂ©e de matiĂšres et de programmes, le latin et les langues anciennes, dans leur forme actuelle, doivent ĂȘtre apprises aprĂšs le bac (en particulier pour de futurs archĂ©ologues ou linguistes).
Mais
Un cours de civilisation des langues romanes pourrait ĂȘtre mis en place en Europe du Sud avec des Ă©changes (voyages, en ligne,…). Ce programme europĂ©en inclurait des Ă©lĂ©ments historiques et linguistiques. On retrouve ce type de programme dans les initiatives de l’intercomprĂ©hension et l’idĂ©e gĂ©nĂ©rale dans ce jeu publiĂ© par Assimil Latinolinguo ou encore cette crĂ©ation originale. C’est aussi une option de survie pour les enseignants actuels en langues anciennes dont l’urgence est plus d’intĂ©resser que de noter…
La convergence et la synergie de plusieurs « matiĂšres » comme l’histoire, les langues anciennes grecque et latine, le français, l’espagnol,… peuvent motiver les Ă©lĂšves et leur faire dĂ©couvrir de nouveaux horizons. L’important pour le latin (et le grec, Ă©trusque, phĂ©nicien…) est d’intĂ©resser et de faire connaĂźtre leur influence. Dans ce cadre des mini-cours de langues anciennes et en particulier celui du latin dont il reste Ă Ă©crire les manuels permettrait une initiation rapide pour pouvoir profiter de ce nouveau cours de substitution.
Ce cours de « culture romane »ou »antique » inclurait par exemple :
- Des courses au trésor pour déchiffrer des inscriptions visibles sur des monuments
- Un apprentissage fun et lĂ©ger de latin comme l’exemple de Legonium et des BD d’AstĂ©rix
- Des jeux comme Latinolinguo ou Ăthymolinguo super motivants et intĂ©ressants
- L’utilisation d’expressions latines en situation théùtrale (parler)
- Des jeux d’intercomprĂ©hension des langues romanes
- L’Ă©tude et comparaison d’institutions civiques d’hier et d’aujourd’hui
- L’histoire du monde grec et romain en utilisant des mots de ces langues
- Une approche des langues de l’antiquitĂ© en lien avec l’histoire du latin et grec
- Des échanges entre élÚves de pays différents et parler latin
- Des initiations Ă l’archĂ©ologie et Ă son travail manuel
- En dessin, l’initiation Ă la calligraphie/Ă©criture ancienne
- Histoire des maths et jeux sur le calcul en base latine…
- L’Ă©tude de l’Europe « romane » d’aujourd’hui
Pour les apprenants mordus, la mĂ©thode et les outils de latin d’Assimil peuvent trĂšs bien permettre un apprentissage en autodidacte ou avec l’aide de parents. Des jeux en ligne et des applications fournissent Ă©galement des supports de qualitĂ© pour pratiquer.
Les combats d’arriĂšres gardes ont rarement fini en victoires. Il s’agit alors de modifier sa stratĂ©gie pour reconquĂ©rir du terrain. Ce sont aujourd’hui AstĂ©rix et Assimil les meilleurs diffuseurs et dĂ©fenseurs du latin… En prendre acteâŻ!